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« 3 Billboards, Les Panneaux de la Vengeance » de Martin McDonagh – La chronique qui sifflera trois fois !

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Le Pitch : Après des mois sans que l’enquête sur la mort de sa fille ait avancé, Mildred Hayes prend les choses en main, affichant un message controversé visant le très respecté chef de la police sur trois grands panneaux à l’entrée de leur ville.

Il suffit de 3 panneaux à Martin McDonagh pour nous livrer une belle leçon de cinéma, une œuvre majeure et brillante composée avec brio.

Les frères Cohen ont enfanté (sans trop de douleur on se rassurera) un héritier qui leur pique sans vergogne leur actrice fétiche (et accessoirement la femme de l’un des frangins) et ce ton particulier qui est leur marque de fabrique.
Ce n’est pas pour autant que « 3 Billboards » manque de personnalité bien au contraire. Subtilement Martin McDonagh, le réalisateur, y inclut des éléments qui lui sont propres, notamment dans la construction de son intrigue qu’il parsème de touches éparses de poésie et de contemplation.
McDonagh ne donne pas dans le Big Mac spectaculaire privilégiant plutôt la small town américaine intimiste dont il démonte les rouages, les travers et les opinions à l’emporte-pièce, avec ironie et bienveillance.

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Frances McDormand

Tout part d’un pitch basique mais redoutablement efficace : une mère de famille ulcérée par la non-résolution du viol et du meurtre de sa fille achète trois panneaux publicitaires pour y exprimer sa rancoeur vis-à-vis des forces de l’ordre qu’elle juge incompétentes et laxistes.

Ce coup de pression met le feu aux poudres et amorce un festival de mesquineries et autres coups de crasse entre les protagonistes procurant un plaisir jubilatoire mais jamais coupable aux spectateurs ravis de cette aubaine qui leur est proposée. L’écriture des personnages participe pour beaucoup à la réussite du film. Les dialogues sont piquants, acérés, fins, drôles, parfois émouvants. Le film réussit ce tour de force de t’arracher des larmes et te faire rire à gorge déployée la minute suivante.

Le métrage ne va jamais là où on l’attend et prend le contrepied des schémas scénaristiques habituels. C’est subjuguant de maîtrise. En tant que spectateur, c’est le kif absolu tant tu te laisses dériver au gré d’un script qui chamboule tous tes repères. A l’heure des blockbusters écervelés et aux scénarios sans consistance ni cohérence, ne pas savoir à quoi s’attendre paraît presque anachronique. Mais si rafraîchissant !

Et quel casting ! Chaque acteur est une pièce maîtresse de ce rubik’s cub émotionnel où chaque face ne propose que faux-semblants tant qu’elle ne sera pas correctement reconstituée.
A commencer par la puissante composition de Frances McDormand qui joue ici le rôle de sa vie (bon ok avec « Fargo ») servie par un scénario qui lui donne la part belle pour exprimer un jeu volontairement austère voire quasi-minimaliste mais paradoxalement ultra-expressif. Le mantra « moins mais mieux » n’a jamais sonné aussi juste.
Pas surprenant qu’elle ait obtenu le Golden Globes de la meilleure actrice sur ce film (l’Oscar ne serait pas du vol non plus les gars) tant elle joue à la perfection cette mère en colère et taciturne. Tour à tour touchante, cynique, agaçante, glaçante, revancharde mais toujours attachante même lorsqu’elle se permet le pire. Elle maîtrise chaque muscle de son visage, pèse chaque mot et rend chaque silence profond, c’en est impressionnant.

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Abbie Cornish – Woddy Harrelson

Woody Harrelson, qui nous a habitué à des rôles plus musclés et plus habités, surprend agréablement dans son rôle de chef de la police pépère, sans histoires et visiblement peu doué pour résoudre ses enquêtes, préférant se consacrer à sa famille. Cette famille qui est sans conteste la touche poétique et lumineuse du film ; et Woody en est le personnage-clé soutenant à lui seul les édifices de l’atmosphère atypique de cette ville.

Sam Rockwell, quant à lui nous prouve, une fois de plus, qu’il est un fabuleux acteur à travers cette composition étonnante de flic raciste, violent, réac et pas très futé sous l’emprise d’une mère abusive dont il subit le poids sans regimber. Ce qu’il fera de son personnage en surprendra plus d’un et constitue une performance qui lui a aussi valu de récolter un Golden Globe.

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Sam Rockwell – Frances McDormand

Certes, Martin McDonagh est cruel avec ses personnages qu’il broie finement pour en récolter à travers un tamis toute la délicatesse et la quintessence mais sa seule ambition est de nous offrir le meilleur, épuré des impuretés, agrémenté d’un glaçage à l’ironie du meilleur effet.

« 3 Billboards » est surtout une histoire de rédemption car au fond, il n’y a que des âmes brisées qui essaient tant bien que mal de recoller leurs morceaux…

4

4/5

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17 Comments on « 3 Billboards, Les Panneaux de la Vengeance » de Martin McDonagh – La chronique qui sifflera trois fois !

  1. Merci pour cette chronique, ça donne envie de le voir.

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  2. Très belle critique. Ce film la mérite bien !

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  3. Salut Mon Dada…
    Marrant mais dès que j’ai vu la Bande Annonce de ce film, je me disais que tu irais le contagionné à ta façon… Au regard de ta note, Frances a encore été à la hauteur et c’est une actrice les plus douées de sa génération… Je l’ai découverte réellement dans Almost Famous… Bref, un film à voir obligatoirement et que je vais aller voir incessamment sous peu… Des becs…

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  4. Tu m’a eu, je note le film !!

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  5. Un drame social vraiment réussi, avec des personnages très bien écrits et beaucoup d’intelligence, j’ai beaucoup aimé également. Gros pouce en l’air pour Sam Rockwell qui vole la vedette !

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  6. Je le voulais celui la et tu m’avais confirmé mon choix il y a quelques temps. Un film magistral et l’interprétation de TOUS les acteurs est a la hauteur !! Sam Rockwell est extraordinaire de naturel et surprenant jusqu’au bout mais Frances et Woody Harrelson bluffants de sincerite
    Un petit chef d’oeuvre !!

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  7. Un grand merci à toi, tes mots me touchent beaucoup. L’ourse a raison : foncez voir ce film pour passer un excellent moment. C’est pas si fréquent 😉

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